vendredi 15 juin 2012

Oslo, 31 Août par Joachim Trier


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Il existe une relation intime entre une personne et sa ville. En effet, si Paris nourrit l’expérience poétique de Baudelaire, Oslo  quant à elle, nourrit incontestablement l’expérience cinématographique de Joachim Trier, à la réalisation de « Oslo, 31 Août ». Pour ce film, ce dernier fait ainsi appel à ses souvenirs d'enfance et à sa perception sensorielle afin de dépeindre son « hometown glory ».

« Oslo, 31 Août ». Au travers de ce titre intriguant, le jeune réalisateur norvégien pose le cadre spatio-temporel de son film.

Pourquoi le 31 août ? Cette date marque la fin des nuits chaudes et nostalgiques de l’été. L’optimisme des beaux jours s’évanouit. Et bien que la nouvelle année débute chaque premier janvier chez les occidentaux, pour les individus présentant une certaine vulnérabilité, septembre apparaît comme un catalyseur de mélancolie.

Vais-je avoir la force de recommencer ? C’est la question que ce pose Anders, en fin de cure de désintoxication. En effet, « aux derniers feux de l’été, c’est la flamme de son existence qui vacille ». Ce personnage vrai et authentique cherche la connexion sociale auprès de sa famille et ses amis. Cependant, le sentiment de solitude le rattrape.

Au cours de la vingtaine, de nombreux choix inhérents à notre  vie personnelle et notre avenir professionnel s'imposent à nous. Et nous restons souvent seuls face au vertige de ces décisions. La notion de vide et de risque prend tout son sens ici, parce que si l’humain est un être de pensées, ces dernières engagent cependant bien plus qu’une simple réflexion : elles influent sur une vie. Même si, rappelons-le, l’existence humaine ne suit pas une marche inéluctable…

Pour Anders, « entre espoir de renouer avec le monde et pulsions de mort », la barrière est mince. Il est la démonstration même de ce qu'est la vulnérabilité, la vie est éphémère. Désorienté, sans repères, avec des amis d’enfance ayant pris une direction différente, ou encore lorsque les rêves de carrière s’évanouissent, l’approche de la trentaine peut se faire périlleuse.

L’auteur use d’un sujet existentiel et intemporel afin d’impliquer le spectateur. Il s’agit ici de se sentir concerné par un personnage que la maladie désocialise. Être conscient des richesses de ce monde et être incapable d’y prendre part… C'est le combat d'Anders.

La maladie handicape également Anders dans sa recherche d’emploi. Le fameux problème du trou sur le cv... Ce bout de papier, pourtant non exhaustif, répertorie pour le moins nos activités professionnelles année par année. Les recruteurs recherchent alors le profil parfait, sans faille. Mais ne vaut-il mieux pas le cv imparfait d’une personne grandie par le vécu et l'expérience que l’inverse ?

Cette expérience sensible nous permet d’explorer la dimension psychologique des personnages. Joachim Trier associe esthétisme et profondeur afin de nous livrer un film rempli d’émotions. Son incroyable maîtrise de la lumière participe beaucoup à la beauté des images. Dans l’idéal de l’auteur, « la sophistication structurelle et philosophique d’un film doit véritablement répondre à une certaine beauté visuelle ».